Carnet de route

Le couloir de l'Entonnoir

Sortie :  du

Le 01/06/2009 par Denis Faivre

Mont-Dore 21 et 22/03/2009

 

Le Chalet du Sancy ; 30 personnes du CAF Beaugency

Des skieurs, des randonneurs et des alpinistes (confirmés ou débutants)

Une météo splendide (un peu de vent…) de la neige en quantité, un peu dure pour les skieurs mais agréable à cramponner

Bref un superbe Week-End

 

Je laisse Denis nous raconter sa version de l’Enfer…

 

 

Passer par l’Entonnoir… au bout du Val d’Enfer : tout un programme dans ces quelques mots.

 

 

Une première pour notre cordée (Christine, Christophe et moi), mais pas pour les mêmes raisons.

Christophe et Christine parce qu’ils ne l’avaient jamais fait, et moi, parce que je ne l’avais jamais fait non plus … mais aussi parce que je n’avais jamais fait de couloir de ce niveau.

 

Alors, allons-y : départ tranquille depuis le gîte CAF avec les trois autres cordées après avoir rempli notre fiche d’aide à la décision (peu de blanc et de vert pour moi, mais je suis « double débutant » : en alpi …et sur cette course… ; alors faisons confiance aux « anciens » !).

 

Pour cette occasion, Christine a arboré sa plus belle coiffure !

 

Nous dépassons le panneau « Danger », pour remonter tranquillement jusqu'au fond de l’Enfer (pardon du Val d’Enfer). Soleil radieux, conditions de neige bonnes. Le vent est tombé par rapport à la veille ! Heureusement pour la suite de l’histoire.

 

« C’est au pied du mur qu’on reconnait… ». Chaque chef de cordée choisit sa voie. Deux cordées pour le Y et deux cordées pour l’Entonnoir. Donc devant nous : Christian et Claude … ils nous feront une bonne trace malgré les chaussures de Claude qui ne sont pas adaptées aux crampons et qui le font un peu ressembler à Charlot, mais c’est une autre histoire.

 

Dès le début, nous attaquons franchement : quasiment en ligne droite, une bonne pente à au moins 30 ° (l’estimation est difficile !). La neige est un peu gelée, mais les crampons accrochent très bien (des vrais marches d’escalier… un peu hors des normes « Lapeyre » pour la profondeur, mais on y met les doigts de pied quand même). Montée tranquille, au rythme montagnard. La cordée est harmonieuse.

On affine les techniques de pose de pied, de passage de corde, on discute de ce qui nous attend, … et je me dis que j’aurais bien du prévoir un second piolet (tiens, le contrôle du matériel avant de partir n’est pas dans la fiche d’aide à la décision…) !

Heureusement je remarque que Christophe est suréquipé (y compris cette fameuse dragonne pour le piolet) ; je ferais donc le « plein » avant le passage délicat de l’entonnoir (qui a donné son nom au couloir) sur un petit replat que je repère de loin.

 

Christian et Claude, au passage décisif, nous arrosent copieusement de neige et de glace en taillant leurs marches… on a du sortir le parapluie ; ou plutôt on a du faire une pause, car nous avancions plus vite qu’eux et nous nous rapprochions trop.

Alors même si cela n’a pas duré longtemps… sur une pente à plus de 35°, avec seules les pointes de pied engagées dans les marches, les mollets travaillent et le froid se fait vite sentir au travers des chaussures !

Christian annonce « tout glacé » dans le passage… et pour compenser : présence d’un relais au dessus.

Sa cordée passée, nous repartons et arrivons à notre tour au passage crucial ; évaluation de la situation avec Christophe (mais sans la fiche !!) : Christine et moi nous calons sur le replat. J’assure Christophe qui entame la glace. Inconnues : position exacte du relais et longueur de corde nécessaire !!!

Malgré un gros bloc qui nous sépare, la communication passe, jusqu’à ce que Christophe m’annonce « encore cinq mètres »… Juste la longueur de corde restant entre ma main et mon baudrier… Et puis silence radio. La corde file lentement…. Pas de nouvelles de Christophe ; encore 50 centimètres et Christine et moi commençons à envisager de trouver une solution.

 

Apparemment ce ne sera pas nécessaire. La corde s’arrête. Une pause, puis elle file de nouveau et  se tend ; question : Christophe a-t-il besoin de corde ou est-il au relais et prêt à m’assurer ? Je ne bouge pas ; la traction recommence, douce, insistante, comme pour m’inviter à monter. Je ne bouge toujours pas ; à la troisième, je me lance. Et je sens Christophe qui avale comme quelqu’un qui assure normalement... ce doit être bon !

Il faut avouer que mon hésitation était lié au fait que je me sentais un peu nu : je n’ai pas pensé à demander le second piolet à Christophe (et de plus j’étais sensé l’assurer).

 

J’y vais donc prudemment.

Seules les deux pointes avant de mes crampons mordent la glace sur quelques millimètres, pas mieux pour le piolet et le tout sur une pente que je préfère ne pas estimer !

Et soudain, en regardant où je vais poser mon pied droit, grosse émotion : la sangle de mon crampon traine allègrement sur la glace ; je risque de ne plus me retrouver que sur deux pattes (ou plutôt un pied et une main) équipées et la coiffure de Christine se retrouver peignée avec mon crampon !

Une poussée d’adrénaline, une profonde respiration, le cerveau qui tourne comme un ordinateur, un rapide point avec Christophe (avec qui je peux de nouveau communiquer) et Christine.

Contrairement à ce que propose Christophe (passer plus à droite ou il y a « un peu moins » de glace), et en accord avec lui je décide de me rapprocher du rocher auquel je peux « emprunter » une ou deux prises.

Inattention ? Je fais descendre sur Christine une pierre pourrie ; le réflexe à joué et à mon avertissement, elle se place en position de sécurité et seul son casque souffrira (la coiffure a tenu le coup !). Ce ne sera malheureusement pas le cas pour une cordée plus bas qui n’a pas entendu l’alerte, mais le bilan se bornera à une écorchure sur la joue.

La progression continue sans autre incident jusqu’au relais. Le plus dur est fait. Je me vache avec Christophe et Christine nous rejoint, toujours aussi placide et souriante.

Rapide bilan et surprise : mon crampon tient bien… c’est le surplus de la lanière qui s’est détaché.

 

Nous repartons donc corde tendue et le reste de l’ascension se fera sur une bonne pente (40 ou 45° ?) mais dans une neige plus proche de la soupe que de la Gelatti !! Les piolets tiennent mal. On monte à quatre pattes.

 

Avant de sortir, Christophe taille quelques petites marches pour le confort ; cela me vaut un spectacle magnifique d’un personnage se découpant sur le soleil, en contre jour sur un ciel bleu uniforme et faisant voler la neige et la glace….

C’est lui qui a l’appareil photo dans sa poche et pas moi ….

Je ne peux donc que vous laisser imaginer.

 

Je sors donc également, suivi de peu par Christine.

Accolade traditionnelle (mais oh combien chaleureuse) avec Christine et Christophe…. Le bonheur d’une cordée fantastique.

 

Merci à vous deux.

 

Merci aussi aux bénévoles (et aux autres participants) qui ont permis ce Week-End dont beaucoup est encore à raconter… mais c’est une autre histoire.

 

Denis

 

« A chacun son sommet » Lionel Daudet.

 

(cliquer ici pour lire les autres carnets de route)







CLUB ALPIN FRANCAIS ETOILE BALGENTIENNE
MAIRIE DE BEAUGENCY
EB MONTAGNE (CHRISTIAN MAHU)
20 RUE DU CHANGE
45190  BEAUGENCY
Permanences :
Sur les séances "Escalade pour tous"